Le Télégramme · 26 septembre 2008 · OTHELLO

Le Télégramme · 26 septembre 2008 · OTHELLO
Le son doit tendre les choses, opérer un décalage, apporter un autre sentiment.
Presse régionale
Avant-papier
Isabelle Nivet
26 Sep 2008
Le Télégramme
Langue: Français
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LE TÉLÉGRAMME

26 sepembre 2008 · Isabelle Nivet

Othello · Le son entre en scène

La nouvelle création d'Éric Vigner, directeur du CDDB, une réécriture d'Othello, de Shakespeare, traduite avec le dramaturge Rémi De Vos, sera présentée le 6 octobre. Rencontre avec Othello Vilgard, son créateur sonore. On lui doit les bulles sonore  de Débrayage, et les clins d'œil cinématographiques 70 de Jusqu'à ce que la mort nous sépare, créations 2007 et 2006 d'Eric Vigner. Vilgard n'est pas un compositeur, mais un créateur sonore. Les sons, il les coupe et colle, les assemble pour donner au spectacle une couleur largement aussi importante que décor ou costumes.

Mémoire auditive

"Il y a une dissonance qui m'intéressait beaucoup dans l'adagio molto de l'automne, dans les Quatre saisons, de Vivaldi". Retrouver un extrait précis dans une botte de foin... Stockés dans des vinyles, CD ou disques durs, avant de pouvoir utiliser des sons, il faut d'abord en avoir l'intuition, s'en souvenir, d'où une mémoire (et une cédéthèque) énorme...

"Tout a commencé par un travail de prise de notes pendant les lectures de la pièce avec les comédiens, en début d'été. En août, j'ai constitué une banque sonore avec tout ce que j'imaginais pouvoir être utilisé. Je pioche du son partout : j'achète des disques, j'en crée, je coupe des extraits de films..."

DJ scénique

Aussi retrouvera-t-on, dans Othello, de minuscules extraits, difficilement reconnaissables, de Massacre à la tronçonneuse, Il était une fois en Amérique, Ghost dog, Elephant Man, ou 2001 l'odyssée de l'espace...
Kubrick et Lynch ont beaucoup inspiré le son, qu'Éric me laisse libre d'oser. Cette liberté vient du fait qu'il me fait confiance, que je le connais bien et sais ce qu'il veut. J'ai beaucoup travaillé la spatialisation du son, des choses un peu tribales comme les compositions de Rabih Abou Khalil, et puis des pulsations, des nappes.

"Je fabrique le son en direct, pendant que les acteurs travaillent, une présence sonore dont ils n'ont pas l'habitude. Le son doit tendre les choses, opérer un décalage, apporter un autre sentiment. Quand un comédien dit "Je t'aime", ce n'est pas la peine que le son le dise aussi..."