Le Télégramme
18 octobre 2008 · Éliane Faucon-Dumont
Un Othello inattendu et décevant
L'Othello présenté mercredi et jeudi Théâtre de Cornouaille, par ÉRIC VIGNER laisse un sentiment mitigé, quant à son interprétation et sa mise en scène. Que restera-t-il de cet Othello, mis en scène par ÉRIC VIGNER, présenté mercredi et jeudi au Théâtre de Cornouaille ? De très belles images, c'est certain, mais aussi une grande frustration quant au texte et à l'interprétation des comédiens. Le metteur en scène lorientais a voulu se détacher de toutes les versions connues, c'est déjà un pari difficile. Parce que, depuis 1604, la langue a changé, il a traduit la pièce de Shakespeare, en compagnie du comédien Rémi De Vos.
Une entreprise hasardeuse
Comme il vient de monter aux États-Unis, une version de la pièce de Bernard-Marie Koltès, La Solitude des champs de coton, il rapproche les deux textes et tente de mettre en avant leurs points communs. Au vu du résultat, on ne peut s'empêcher de penser qu'il s'agit là d'une entreprise hasardeuse, qui n'a pas payé. Il manque à cet Othello, le souffle, la flamme, la passion qui caractérise Shakespeare et le théâtre de son époque. Samir Guesmi qui joue à contrecourant le Maure, paraît, parfois un peu faible pour ce rôle. Son jeu trop intériorisé, n'en fait pas ce fougueux guerrier venu d'on ne sait où, rompu aux batailles les plus dures. Et puis l'ambiguïté voulue du personnage d'Iago plonge le public dans la plus grande perplexité. Dans leur ensemble, les comédiens donnent l'impression de jouer pour eux, solitaires. "J'ai voulu raconter une histoire de guerre", dit Éric Vigner. Sans doute ! Après tout, Othello, c'est l'histoire de toutes les guerres que font et se font les humains. Sauf, que cet Othello apparaît bien tranquille et que la guerre n'existe que dans les mots. Le phrasé, le langage qu'impose ÉRIC VIGNER à ses comédiens, est également très déstabilisant.
Une belle lumière
Décevant sur le plan du texte et du jeu des comédiens, Othello, est visuellement une vraie merveille. Un décor simple, deux tours qui ramènent à Ground zéro et au 11 septembre, une lumière splendide (signée Joël Hourbeigt), des images, comme celle du matin de la victoire lorsque dans l'aube laiteuse, les gardes s'interpellent, où encore celles de la mort de Desdémone, voilà tout ce qui reste lorsque l'on sort de la salle, c'est à la fois beaucoup pour certains et très peu pour d'autres.