Figaroscope · 24 janvier 2007 · JUSQU'À CE QUE LA MORT NOUS SÉPARE

Figaroscope · 24 janvier 2007 · JUSQU'À CE QUE LA MORT NOUS SÉPARE
Éric Vigner retrouve toute la légèreté, l'impertinence, l'intelligence de ses débuts.
Presse régionale
Critique
Jean-Louis Pinte
24 Jan 2007
Figaroscope
Langue: Français
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Figaroscope

24 janvier 2007 · Jean-Louis Pinte

À cache-cache

Rémi De Vos n'est pas encore un auteur très connu, même s'il est artiste associé au théâtre de Lorient dirigé par Éric Vigner. Ce dernier dit de lui qu'il est, dans son écriture, un comique contemporain. Oui ! Mais un comique qui s'approche plus de la déraison que de la franche rigolade, et qui, l'air de rien, manie la critique des moeurs et des conventions. Une sorte de philosophe du quotidien, dont les mots dressent des remparts à la folie.

Jusqu'à ce que la mort nous sépare, sa dernière pièce, pourrait être du genre réaliste. Un jeune homme revient chez sa mère qu'il n'a pas vue depuis un certain temps, à l'occasion de la mort de sa grand-mère. Il rencontre là une de ses amies d'enfance qui a toujours été amoureuse de lui. Rien que du sérieux dans ce propos. Détrompez-vous ! Au-delà des apparences, De Vos met à mal le conformisme, mitraille la famille et fait des noeuds avec les sentiments. Et ce n'est pas triste.

Critique

Éric Vigner qui nous avait asséné il y a encore peu de temps des mises en scène prétentieuses et ennuyeuses, semble être revenu avec ce texte à un certain état de grâce. Il retrouve toute la légèreté, l'impertinence, l'intelligence de ses débuts. Attentif à ce que cachent les mots, il propose une mise en scène pleine de chausse-trappes, jouant aussi bien avec l'humour noir que l'absurde. Il dynamite le drame, le fait exploser en éclats de rire, bouscule, secoue, fait douter de tout et de rien, sauf du pouvoir du théâtre. Et cela avec un merveilleux sens de l'étrange et de l'irrationnel. Tout concourt à cette réussite.

La scénographie hors du temps, qu'on lui doit également, reflète aussi bien les années 1970 que les décors des films hollywoodiens des années 1950, genre drame de Vincente Minelli. La musique est faite de citations qui traduisent en quelques notes une atmosphère sentimentale.

Puis il y a les comédiens. Catherine Jacob, chipie, rouée, diablesse, Claude Perron, jamais là où on la voudrait. Et surtout Micha Lescot. Ce jeune comédien allie l'élégance nonchalante d'un Cary Grant au comique impassible d'un Buster Keaton. Un funambule qui s'affronte à lui-même. Un archange de l'irréel qui donne à cette pièce la dimension et la fantaisie d'un conte fantastique.