Extrait · Marguerite Duras · LA PLUIE D'ÉTÉ
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(...) L'Instituteur : Le monde est loupé Monsieur Ernesto.
Ernesto, calme : Oui. Vous le saviez Monsieur... Oui... Il est loupé. Sourire malin de l'Instituteur.
L'Instituteur : Ce sera pour le prochain coup... Pour celui-ci...
Ernesto : Pour celui-ci, disons que c'était pas la peine. Sourire d'Ernesto à l'Instituteur.
L'Instituteur : Donc, si je vous suis bien, d'aller à l'école non plus ce n'est pas la peine... ?
Ernesto : Ce n'est pas la peine de même Monsieur, c'est ça...
L'Instituteur : Et pourquoi Monsieur ?
Ernesto : Parce que c'est pas la peine de souffrir. Silence.
L'Instituteur : On apprend comment alors ?
Ernesto : On apprend quand on veut apprendre Monsieur.
L'Instituteur : Et quand on ne veut pas apprendre ?
Ernesto : Quand on ne veut pas apprendre, ce n'est pas la peine d'apprendre. Silence.
L'Instituteur : Comment savez-vous, Monsieur Ernesto, l'inexistence de Dieu ?
Ernesto : Je ne sais pas. Je ne sais pas comment on le sait. Temps. Comme vous peut-être Monsieur. Silence.
L'Instituteur : On apprend comment dans votre système si on n'apprend pas ?
Ernesto : En ne pouvant pas faire autrement sans doute Monsieur... Comment ça se passe, il me semble que j'ai dû le savoir une fois. Et puis j'ai oublié.
L'Instituteur : Qu'est-ce que vous entendez par : j'ai dû le savoir ? Ernesto crie.
Ernesto : Comment voulez-vous que je le sache Monsieur ? Vous ne le savez pas vous-même... Vous dites n'importe quoi il me semble...
L'Instituteur : Excusez-moi Monsieur Ernesto. (...)