Agence France Presse
20 septembre 2006
Le Bourgeois gentilhomme franco-coréen, ode au dialogue des cultures
Paris accueille jusqu'au 30 septembre une adaptation franco-coréenne du Bourgeois gentilhomme, qui transforme en un dialogue subtil l'apparent choc des cultures, sans renoncer à la veine bouffe et aux grands moyens (comédiens, danseurs, musiciens) de la comédie-ballet.
Le Jeu du Kwi-Jok ou Le Bourgeois gentilhomme est donné lors de dix représentations à l'Opéra-Comique puis du 3 au 7 octobre au Quartz/scène nationale de Brest, dans le cadre des célébrations en 2006 du 120e anniversaire des relations diplomatiques entre la France et la Corée.
Le spectacle a été monté avec une trentaine de comédiens, chanteurs, danseurs et musiciens du Théâtre national de Corée à Séoul, où il a été créé en septembre 2004. L'adaptation de la comédie-ballet de Molière et Lully et sa mise en scène sont signées éric Vigner, directeur du CDDB/Théâtre de Lorient, où la pièce a été donnée en première française en octobre 2004.
Le metteur en scène avait été sollicité fin 2002 par le Théâtre national de Corée - fondé en 1950 - pour y monter une oeuvre majeure du répertoire classique français mettant en valeur la richesse de ses quatre compagnies (Théâtre, Opéra, Orchestre et Ballet nationaux). Actif depuis 1995 dans une ville au nom évocateur - anciennement "L'Orient" - où Louis XIV implanta la Compagnie des Indes en 1666, éric Vigner a choisi de travailler sur Le Bourgeois gentilhomme, divertissement créé en 1670 à la demande du Roi Soleil, qui voulait se venger d'un faux ambassadeur turc.
Chef-d'oeuvre universel où il est "question de l'autre", selon le metteur en scène, Le Bourgeois gentilhomme se prêtait bien à une adaptation intégrant des éléments d'une autre culture.
Certes, le spectacle peut surprendre de prime abord, joué dans une langue - le coréen - dont le rythme et la musicalité offrent un cadre singulier au propos de Molière.
Mais le choix de confier le rôle de Monsieur Jourdain à un jeune acteur, Lee Sang-Jik, qui s'adonne avec enthousiasme au "jeu du noble" (kwi-jok en coréen), s'avère payant.
Dans un décor orné de motifs de laques orientales et sur un plancher frappé d'un paon blanc majestueux, les costumes traditionnels amples et colorés qui habillent nombre de personnages sont un baume pour les yeux.
En fosse, cordes et flûtes coréennes apportent une touche exotique à la partition de Lully sans la trahir, et les percussions accompagnent habilement le passage d'une scène à l'autre.
La "turquerie" notamment est très réussie, façon rituel extrême-oriental hilarant. A l'humour, le spectacle ajoute la grâce des danseurs qui, avec éventails ou sabres, composent des ensembles de toute beauté.
Seul bémol, les interventions vocales, offertes dans un français approximatif et étrangères, d'un point de vue stylistique, aux exigences du chant baroque.