Ouest France · 13 novembre 2009 · PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA

Ouest France · 13 novembre 2009 · PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA
Le théâtre de Duras
Presse régionale
Avant-papier
13 Nov 2009
Ouest France
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13 novembre 2009

Bouleversante

"Marguerite Duras n'a pas écrit que des conneries, disait Pierre Desproges. Elle en a aussi filmées !" Souvent moquée, la romancière tient sa revanche grâce à Valérie Lang, bouleversante héroïne d'Hiroshima mon amour, devenu pièce de théâtre, à Rennes, cinquante ans après le film d'Alain Resnais. La comédienne incarne cette femme libre, assumant le déshonneur de sa liaison avec un soldat allemand puis son coup de foudre pour un architecte japonais, sur fond de ruines à Hiroshima. "Je suis d'une moralité douteuse, dit l'héroïne. Je doute de la morale des autres."

Haïku

Valérie Lang voit le texte d'Hiroshima comme "un haïku aussi politique qu'intime, d'une intensité extrême." Christine Letailleur, à la mise en scène, estime que Duras parle aux adolescents :"De son style dépouillé, elle leur montre le gouffre, le chaos de la vie. Mais, plutôt que faire la morale, elle les incite à vivre librement. Dans Hiroshima, on est loin de l'adultère suranné à la Feydeau." Cette capacité à toucher les nouvelles générations expliquerait que l'œuvre de Duras, que l'on étudie au lycée treize ans après sa disparition, n'ait jamais connu de réelle désaffection. En librairie, ses livres se vendent toujours. Et pas seulement L'amant, le prix Goncourt 1984.

Cadeau

Les droits d'Hiroshima, Éric Vigner, le directeur du Centre dramatique de Bretagne, à Lorient, en est l'héritier. Marguerite Duras s'était éprise de son travail alors que, jeune metteur en scène en 1993, à Brest, il avait monté Pluie d'été. "Elle aimait que l'on bouscule ses textes jusque-là présentés de manière très lente, solennelle, se souvient-il. Elle me disait : ' Je n'écris pas pour les morts vivants ! '" " Ce "cadeau", Vigner l'a fait fructifier en présentant Hiroshima mon amour, en 2006, au Festival d'Avignon et en faisant entrer Savannah bay au répertoire de la Comédie-Française, en 2002.

Classique

L'intime et la grande histoire se télescopent aussi dans La douleur, texte terrible où Duras raconte le retour de son mari Robert Antelme du camp de concentration de Dachau. Le texte n'a pas été écrit pour la scène. La comédienne Dominique Blanc l'incarne pourtant au théâtre, sur une mise en scène de Patrice Chéreau. "Chaque soir, le public est saisi, confie-t-elle. Duras est devenue un auteur classique, de la trempe des grands tragédiens." Après Laval cette semaine, Dominique Blanc jouera, au printemps, à Sablé-sur-Sarthe et à Cesson-Sévigné, mais aussi à Madrid, Rome, Athènes.