Ouest France
18 juin 2003
Savannah Bay clôture la saison du NTA du 24 au 26 juin. Deux Catherine effeuillent la Marguerite
Avec Savanah Bay, Marguerite Duras a fait son entrée officielle au répertoire de la Comédie Française. Ce chef-d'œuvre fragile et troublant conclut en beauté la saison du Nouveau Théâtre d'Angers.
Son enfance indochinoise a, on le sait, profondément marqué Marguerite Duras. Elle a choisi Savannah Bay, petite ville du Siam, pour évoquer l'intense passion amoureuse d'une jeune femme de seize ans et d'un jeune homme inconnu, qui se rencontrent au milieu de la mer, sur une pierre blanche léchée par les vagues. Mais l'amoureuse meurt après avoir accouché, d'un suicide, probablement.
Deux femmes explorent alors les méandres de la mémoire pour évoquer cet événement dont elles n'ont pas été témoins, mais qui a bouleversé leur vie. L'une est sa mère, comédienne célèbre et déjà âgée. Entre réminiscences et affabulation, silences et immobilité, un dialogue s'instaure autour d'une seule certitude : ce rocher blanc où se retrouvaient les deux amants.
Obsession de l'amour, de la mort, de la mémoire et de l'oubli tous les thèmes chers à Marguerite Duras sont là, dans ce que le metteur en scène Éric Vigner appelle un livre matériau Savannay Bay, avec la mort d'un enfant et la dissolution de l'amour annonce toute l'oeuvre Durassienne et fait entrer l'auteur dans ce panthéon de l'art dramatique qu'est "La Comédie-Française".
Écrite en 1982, la pièce avait été créée par deux autres monstres sacrés : Madeleine Renaud et Bulle Ogier. Directeur du Centre Dramatique de Bretagne à Lorient, Éric Vigner qui avait déjà mis en scène La pluie d'été, réunit deux comédiennes d'exception, elles aussi sociétaires, Catherine Samie et Catherine Hiegel.