Le Télégramme
6 février 1997 · Éliane Faucon-Dumont
"BRANCUSI contre Etats-Unis ": huis-clos au Pavillon
Massé sur cieux rangées face à une étrange construction de bois, le public, ce mardi, s'apprête à vivre un procès retentissant, opposant le sculpteur CONSTANTIN BRANCUSI aux Etats- Unis, en 1927.
L'oiseau, pièce à conviction
Nous sommes à la Cour des Douanes des États-Unis, le vol d'un avion, le cri d'un oiseau déchirent parfois le silence. Une hôtesse, style aéroport, annonce les différentes phases du procès. L'oiseau, pièce à conviction, est omniprésent dans le jeu souvent aérien des acteurs, dans les maquillages, qui ne sont pas sans évoquer le volatile et jusqu'au "fil" qui entoure la cheville de l'une des actrices.
Les protagonistes sont tous là et entament un jugement non dénué de passion. Charles J. Lane, J. Speiser, "avocats du demandeur", assisté par maître Thomas Lane, avocat...
Charles D. Lawrence, procureur général adjoint, avocat du défendeur, assisté par Marcus Higginbotham et Reuben Wilson. F. Kurtz, rapporteur, le juge Waite, président, et le juge Young vont délibérer sur l'art... "L'oiseau dans l'espace" devient pièce conviction. Preuve de l'immatérialité du sujet, jamais celle-ci ne sera montrée au cours de la soirée, le spectateur-auditeur l'imaginera à son gré...
Partie prenante
Dès lors, nous voici partie prenante, acquis à Edward Steichen, propriétaire de l'oiseau en question. L'acteur qui l'incarne est fabuleusement crédible, maniéré, cabot, sincère, ardent dans son plaidoyer en faveur de BRANCUSI. L'argumentation du Jacob Eptein, le sculpteur, est aussi brûlante.
Bien entendu, la fin de la pièce n'apportera pas forcément de réponse. Qui peut d'ailleurs trancher ? Mais simplement dans son efficace mise en scène elle aura permis à tout un chacun d'appréhender un peu mieux des questions très actuelles sur l'impossible définition de l'art, sur un mode plaisant, aussi aérien parfois que le vol d'un oiseau magnifique.