Le Télégramme (Quimper)
4 février 1997
Scène nationale : « Brancusi contre États-Unis » ce soir au Pavillon
« L'objet du litige était une pièce en métal jaune, dont l'identification laissait les autorités américaines perplexes... De forme mince et fuselée, mesurant 1,35 de haut et polie comme un miroir, elle suggérait pour certains un objet manufacturé (dont l'utilisation demeurait cependant mystérieuse) alors que d'autres y voyaient une oeuvre d'art, aussi belle que celles exposées dans les plus grands musées du monde.
Alors, s'ouvrit à New York en 1927, le plus célèbre procès autour de la définition de l'oeuvre d'art : Brancusi contre états- Unis. Ainsi s'exprime dans la préface des « Minutes du procès de Chicago », Margit Rowell, conservateur en chef du département des dessins du Museum of modern art de New-York.
Connu et apprécié aux États-Unis, le sculpteur Constantin Brancusi exposa régulièrement dans ce pays entre 1914 et 1926. Un avocat new-yorkais, John Quinn, amoureux du travail de l'artiste, parvint à détourner la trop grande curiosité de la douane américaine, lui évitant ainsi les ennuis... En 1924, Quinn mourut d'un
cancer. Deux ans plus tard, la douane arrêta une vingtaine de pièces. Celles-ci furent taxées comme des marchandises. Brancusi porta plainte, « L'oiseau dans l'espace » devient pièce à conviction lors du procès qui s'ouvrit en octobre 1927, opposant Brancusi aux États-Unis. Six témoins, directeurs de publications d'art, de musée, viendront dire leur intime conviction : « L'oiseau dans l'espace » est une véritable oeuvre d'art. Le procès s'achèvera le 26 novembre 1928 par la victoire du sculpteur. Depuis, le jugement fait jurisprudence aux USA.
Les minutes de ce procès retentissant ont fait l'objet d'un livre passionnant qui a inspiré Éric Vigner.