Ouest France
09 janvier 1996 · Y. L.
L'Illusion comique ouvre la saison
L'Illusion comique est une oeuvre à part dans le théâtre de Corneille. Éric Vigner l'a choisie pour débuter sa première saison à la direction du Centre dramatique de Bretagne. Huit représentations sont prévues, à partir de vendredi.
Du 9 mai au 18 juin 1995, Éric Vigner mettait en scène Bajazet de Jean Racine, avec les Comédiens français, au théâtre du Vieux-Colombier. Du 12 au 20 janvier au Quai Ouest, il réalise sa première création lorientaise avec L'Illusion comique de Pierre Corneille. Ce choix délibéré du théâtre classique est un pari osé.
A Éric Vigner de démontrer que, sur une agglomération de moins de 150 000 habitants, où le public universitaire reste peu important, il y a une attente pour ce répertoire difficile.
Le pari est d'autant plus risqué que Vigner propose une version très dépouillée de l'oeuvre de Corneille. Un décor minimaliste, des costumes en noir et blanc, une scénographie dépouillée : autant d'éléments qui ne simplifieront pas, a priori, la compréhension d'une pièce par elle-même déjà très déroutante. Après toute une série de comédies de moeurs, fines et habilement tournées, L'Illusion comique occupe une place à part dans le théâtre de Corneille.
Celui-ci donne la même année 1636 Le Cid et L'Illusion comique, cet "étrange monstre" selon sa propre expression. Il ne s'agit pas d'une comédie, comme on l'entendait alors, mais d'une fantaisie qui mêle réalisme et fiction pure. Le héros est un comédien, que l'on voit tantôt dans sa vie quotidienne, tantôt dans les personnages qu'il incarne. Construction en miroir où le théâtre se joue du théâtre, et où la vérité profonde naît peut-être de l'apparente illusion...
Une première très attendue
Inutile de dire que le petit monde culturel attend avec beaucoup de curiosité le jeune et brillant metteur en scène nommé par le ministère. Éric Vigner a commencé sa direction du Centre dramatique de Bretagne par d'importants travaux dans la salle du Quai Ouest.
La saison a été raccourcie d'autant. Elle démarre avec une pièce "élitiste", traitée de façon très novatrice. Qu'est-ce que cela va donner ? Une polémique entre partisans et adversaires de ce Corneille revisité par Vigner ? Un agacement face à un excès de parisianisme débarquant en province ? Ou, tout simplement, le plaisir d'entrer avec les repères d'aujourd'hui dans une oeuvre du Grand Siècle ? Réponse, vendredi soir, à l'occasion de la première.