Le Bien Public (Dijon) · 30 mars 1996 · L’ILLUSION COMIQUE

Le Bien Public (Dijon) · 30 mars 1996 · L’ILLUSION COMIQUE
Tout en subtilité théâtrale
Presse régionale
Critique
Nathalie Bouley
30 Mar 1996
Le Bien Public (Dijon)
Langue: Français
Tous droits réservés

Le Bien Public (Dijon)

30 mars 1996 · NATHALIE BOULEY

L'Illusion comique de VIGNER : Quoi de neuf ? CORNEILLE !

La mise en scène d'ÉRIC VIGNER a beau être foncièrement moderne, c'est du pur CORNEILLE que l'on savoure pendant deux heures trente. Dans ce texte où semblent s'imbriquer plusieurs histoires, plusieurs intrigues et tous les genres du théâtre poussés à leurs extrêmes, on retrouve l'univers de CORNEILLE et le regard qu'il pouvait porter sur le théâtre, cet art noble dont il fait l'apologie avec son Illusion comique.

Avec CORNEILLE, avec VIGNER, on passe du rire aux larmes, de la légèreté à l'émotion la plus vive, la plus profonde. On bascule de la gravité à la dérision, de la tragédie à la comédie, de la réalité à l'illusion tout en subtilité théâtrale, ÉRIC VIGNER maniant la scénographie, l'esthétique plastique, la direction, d'acteurs d'une main de maestro, s'en donnant à coeur joie avec ce texte singulier de Corneille.

D'un quiproquo à l'autre

L'Illusion comique n'a rien des classiques pièces rigoureuses que CORNEILLE écrivait. La définir est un vérItable casse-tête : le premier acte ressemble à un prologue, les trois suivants forment une pièce tout en rebondissement, en fiction dans la fiction. L'action n'y est pas complète puisqu'on ne sait même pas à la fin du quatrième acte qui la termine, ce que deviennent les principaux protagonistes. Cela a l'air complexe mais revisité par VIGNER, on vogue d'un quiproquo à l'autre, d'un sursaut d'intrigue à un autre, d'un registre à l'autre sans difficulté. Grâce à ÉRIC VIGNER, le spectateur se fait le complice de CORNEILLE, riant des comédiens qui usent et abusent de mimiques, de gestuelles, qui déclament sans trouver le ton.

L'Illusion comique est une magnifique histoire d'amour, dans laquelle se mêle le récit d'une errance, celle d'un père à la recherche de son fils; un fils fragile, en mal d'identité qui tombe sur l'amour et finit par trouver sa vérité en compagnie de sa belle dans le métier d'acteur. Et le théâtre dans tout cela ?

Il est non seulement l'art par lequel se véhicule cette histoire et l'instrument, le miroir utilisé par CORNEILLE au sein même de sa pièce pour permettre à ce père et à ce fils de se retrouver. Pas étonnant qu'ÉRIC VIGNER ait intégré dans son décor tout un jeu de vitres transparentes aux reflets étonnants, bousculant les conventions traditionnelles, supprimant le rideau, immisçant un ensemble à cordes pour rythmer sa création, gardant le panache folklorique des costumes et maquillages. Portée par des comédiens merveilleux et malgré quelques minces longueurs, L'Illusion comique de VIGNER séduit.