ACCUEIL DE LA PIÈCE
EMMANUEL JACQUART commente RHINOCÉROS d'EUGÈNE IONESCO
En France, la création fut assurée par Jean-Louis Barrault le 22 janvier 1960, à l'Odéon-Théâtre de France.(...) Chaque soir, la salle était comble, d'autant que la distribution était impressionnante. (...) La critique fut dans l'ensemble favorable. Nous donnons ici quelques réactions; Jacques Lemarchand, fervent défenseur de Ionesco depuis la première heure, écrivait: "Rhinocéros dit les choses si limpidement - encore que ce soit sous forme de l'allégorie - qu'il faudrait vraiment s'avouer bien benêt pour ne pas les entendre. Et il me paraît, les ayant entendues, qu'elles ne peuvent qu'intéresser la sensibilité."
De son côté, Jean Vigneron remarquait: "Cette fois, plus d'erreur possible, Ionesco écrit en français ! Et son RHINOCÉROS est une oeuvre tout à fait claire, d'un symbolisme limpide, d'autant plus forte qu'elle est plus accessible et d'une portée d'autant plus grande que tous peuvent en saisir la signification."
Plus circonspect, Simon constatait: "Ionesco a beaucoup d'humour et autant de bonne volonté. Contrairement aux apparences, il n'a jamais cherché à déplaire. Au contraire. Et pour remercier ces messieurs-dames (le beau monde officiel d'un théâtre de pourpre et d'or) de l'avoir arraché aux théâtre-caves, il fait semblant de se prendre au sérieux, de les prendre au sérieux; il fait dans l'humanisme intégral, dans les bons sentiments et les grandes idées."
Quant à Poirot-Delpech, il regrettait l'auteur d'avant-garde qui avait découvert l' "insolite de la banalité" mais qui, aujourd'hui, se cantonnait dans la "banalité de l'insolite" et dans un symbolisme didactique qu'il avait précédemment condamné. Ce faisant, ajoutait-il, Ionesco "rejoint en quelque sorte l'académisme des "rhinocéros" du théâtre" (...)
(...) À l'étranger, et particulièrement à Londres, à Zurich et à New York, Rhinocéros obtint la faveur du public.