La Truffe · 15 octobre 1991 · LA MAISON D'OS

La Truffe · 15 octobre 1991 · LA MAISON D'OS
Habiter les lieux le temps d'un rêve.
Presse nationale
Avant-papier
Dorothée Noblet
15 Oct 1991
La Truffe
Langue: Français
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La Truffe

15 octobre 1991 · Dorothée Noblet

Le théâtre en souscription joue sur Dubillard

Pour La Maison d'Os de Roland Dubillard, dans le cadre du Festival d'automne, une galerie de La Défense accueille une jeune compagnie de théâtre. Lancée sur souscription, vivant d'expédients et explorant des lieux inhabituels.

Dans une sorte de gorge, des lampes, des centaines de bidons sont accumulés. Nous sommes sous le socle de la Défense, un lieu de passage que l'on loue 50 000 francs la journée pour des cocktails d'entreprise. "Cet endroit ne sert à rien, ne ressemble à rien, c'est pourquoi nous l'aimons." Loin de la lumière du jour, dans un espace où résonnent chaque mot, chaque souffle, de très jeunes comédiens répètent La maison d'Os de Roland Dubillard. La Compagnie Suzanne M. est née en septembre de l'an dernier, sur un coup de tête d'éric Vigner son directeur. C'est une association à loi de 1901, lancée sur souscription, comme La Truffe.

éric Vigner est pourtant un comédien au parcours classique: formation à la rue Blanche (ENSATT), au Conservatoire de Paris dont il sort en 1988 et où il monte une pièce de Corneille. Metteur en scène, il participe au Festival des cultures du monde à Nantes. Posé, concentré, il raconte sa Compagnie: "En 1962, le théatre de Lutèce créait La Maison d'Os de Roland Dubillard dans une mise en scène d'Arlette Reiner. Jamais reprise depuis, ou alors de manière fort discrète. C'est une pièce atypique dont les scènes semblent placées les unes à côté des autres. Elle raconte l'abandon, le voyage dans un corps intérieur." Et parce qu'il se sent lui-même abandonné, éric Vigner se lance dans l'aventure. Un de ses amis achète à Issy-Les-Moulineaux, une ancienne manufacture de matelas désaffectée; le lieu lui plaît et il y monte La Maison d'Os. Ses moyens financiers seront les 40 000 francs récoltés par souscription auprès des vingt acteurs et de tous ceux qui rayonnent autour du spectacle. Ils avaient pourtant fait une demande de subvention, qui n'arriva qu'après la bataille. Janvier 1991, six représentations en l'espace de trois jours, 500 adhérents souscripteurs. Le matériel est emprunté dans tous les théatres de Paris, les costumes sont récupérés à droite et à gauche. Dans la salle 70 places, mais, à chaque fois, le même succès. Avril 1991: reprise pour quinze représentations de La maison d'Os, et nouvelle campagne de souscriptions. à nouveau les artistes se font les actionnaires de leur propre spectacle; les souscriptions en couvrent les frais. Quant à leur cachet... Chaque soir après la présentation, on partage la recette. Leurs projets : après ces représentations exceptionnelles à La Défense dans le cadre du Festival d'automne, créer de nouvelles mises en scène hors les théâtres. Pour jouer, l'espace de quelques nuits, dans des lieux de passages. Les habiter. Le temps d'un rêve.