Le Télégramme · 3 octobre 1998 · MARION DE LORME

Le Télégramme · 3 octobre 1998 · MARION DE LORME
Éric Vigner : talentueux peintre d'images et sculpteurs d'univers.
Presse régionale
Critique
03 Oct 1998
Le Télégramme
Langue: Français
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Le Télégramme 

3 octobre 1998

VICTOR HUGO le disait : le théâtre peut ébranler les multitudes; tout est toujours possible à tout moment. ÉRIC VIGNER, pour la reprise de la saison 98/99 du Théâtre de Lorient, a transmis ce message intemporel avec l'éblouissante création de Marion De lorme. Un hommage aux devoirs que l'homme doit à sa pensée.

Lever de rideau sur une scène presque dépouillée, souci de l'image, esthétisme d'un décor qui allie délicatesse et jaillissement. Après que les comédiens aient raconté la préface que VICTOR HUGO écrivit pour sa pièce, les personnages s'animent,dans un apparent immobilisme, qui survalorise le texte, le vers, la musique du mot qui transporte la passion, les mots du coeur et du corps exigeant.

L'oeuvre de VICTOR HUGO marquait un coup d'état littéraire, la forte direction d'un nouveau romantisme, la tendresse et la noirceur, la puissance et la fragilité des êtres et des intentions. ÉRIC VIGNER a posé sur le plateau une oeuvre d'une dimension poétique poignante, novatrice, suggestive, d'un romantisme pleinde ruptures, d'un humour délicatement désopilant. Le choix du travail sur le texte crée un parallèle très étroit et judicieux entre la distance que la versification crée par rapport au sens et celle que la diction martelée, ou soupirée, des comédiens ramène au coeur du sens. Le vers devient alors la seule expression possible. La mort n'est jamais loin de l'amour, prix de la vie à payer sans détour.

Exhaltant

Les comédiens, totalement maîtres de leur sujet, concentrés et amusés, jouant de leurs voix et de leurs corps et de leurs capacités étonnent, On remarque la très belle et convaincante Autrichienne Jutta Johanna Weiss dans le rôle titre, séductrice et séduisante du troisième type.

Et les cinq musiciens de l'ensemble Matheus, dont les cordes s'accordent ou contrastent, et viennent compléter le rêve.

Le Marion De lorme de Vigner réduit les presque trois heures de sa durée à un moment indéfini et palpitant de bonheur intemporel. Il laisse, pantois et léger, des mots et des espoirs : "Un combat vaut mieux qu'un supplice".

Vigner poursuit sa route, dans une vision théâtrale qui s'enrichit sans cesse, rebondit de recherches en affirmations, talentueux peintre d'images et sculpteurs d'univers.