L'histoire de la pièce · Folio Théâtre 1999
ACTE I
La pièce s'ouvre sur une scène d'extérieur qui plante le décor: une petite ville de province avec son épicerie, son église et sa terrasse de café, par un beau dimanche d'été. Scène d'extérieur mais aussi scène d'atmosphère drolatique qui présente des fantoches cocasses dont un Logicien ahurissant, ainsi que deux personnages essentiels, deux types d'hommes opposés, l'un nommé Jean, prototype de l'intolérance et du prêt-à-penser de l'époque fasciste, l'autre nommé Bérenger, être inoffensif en proie au malaise existentiel, montrant un faible pour la boisson, comme Eugène Ionesco lui-même auquel il ressemble. Jean ne cesse d'admonester Bérenger à travers un discours pontifiant émaillé de préceptes ayant trait à "l'homme supérieur" qui "remplit son devoir". Soudain, le fantastique et l'absurde s'insinuent dans cet univers paisible, par le biais du logicien qui métamorphose le réel et par l'irruption d'un rhinocéros - matérialisation concrète de l'intrusion de l'Histoire et de la violence fasciste - dans le monde civilisé.
ACTE II
Tableau I
Changement de décor, le spectateur a sous les yeux un tableau vivant mettant en scène le personnel d'une entreprise juridique. il découvre alors le monde du travail et des rapports hiérarchiques: Dudard, le sous-chef de service, Botard, le défenseur du syndicalisme et de la lutte des classes, Daisy, la jolie dactylo, M. Papillon, Mme Boeuf et Bérenger, le protagoniste. La conversation devient polémique et tourne autour de "l'évidence rhinocérique"; en réalité, elle révèle les attitudes politiques et sociales des uns et des autres envers le totalitarisme.
Tableau II.
Scène d'intérieur: la chambre de Jean à qui Bérenger vient rendre visite. C'est le lieu de la métamorphose visible, Jean perdant petit à petit ses attributs humains et se transformant en rhinocéros: une corne lui pousse sur le front, sa peau verdit, sa voix devient rauque. Ce retour "à la Nature" est, en fait, une régression, un retour à la barbarie. Jean fonce d'ailleurs sur Bérenger qui fuit, alors qu'a l'extérieur défile un troupeau de rhinocéros.
ACTE III
Scène d'intérieur: la chambre de Bérenger. Tête bandée et inquiet, le proganiste reçoit la visite de Dudard. S'engage alors un dialogue portant sur l'attitude observée devant la rhinocérite. En intellectuel, Dudard finasse, ergote, théorise. Survient Daisy, la petite amie de Bérenger, qui annonce la mutation de Botard et de M. Papillon. Devant la généralisation de la rhinocérite, Dudard rejoint, lui aussi, le troupeau avant que Daisy n'en fasse autant. Resté seul, Bérenger s'apprête à résister à la marée des rhinocéros. Dans un geste dérisoire mais qui a valeur d'exemple pour le spectateur, il saisit sa carabine et s'exclame: "Je ne captule pas!".