Le Quotidien · 18 octobre 1991 · LA MAISON D'OS

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Presse régionale, Avant-papier

Le Quotidien

18 octobre 1991 · Caroline de Camaret

Dubillard saisi par la jeunesse

Un vieillard est muré dans la solitude de sa demeure, dans l'étroitesse de son corps. Éric Vigner a choisi comme nouveau décor à la Maison d'os de Dubillard le gigantisme post moderne de la Grande Arche, Explication.

ROLAND DUBILLARD est l'un des plus passionnants écrivains de théâtre, et son univers d'écriture d'une couleur fantaisiste, très personnelle, a toujours séduit. En 1962, il écrit la Maison d'os qui raconte «l'agonie d'un vieillard dans sa maison isolée du reste du monde, abandonnée par lui comme ses habitants s'abandonnent les uns les autres»...

Cette pièce, centrée sur le thème de la mort, a une première fois été montée par Éric Vigner, un jeune metteur en scène prometteur, dans une matelasserie désaffectée d'Issy-les-Moulineaux. Le décor seyait alors à merveille à l'atmosphère de décrépitude, précarité et ruine morale de l'oeuvre de Dubillard.

Aujourd'hui, c'est l'Arche de la Défense qui accueille ses répliques morbides. Un choix qui a sa logique, nous dit Éric Vigner : «Cet emplacement, ce gros corps cru sans mémoire va bien avec la pièce ; car Dubillard décrit un voyage métaphysique à l'intérieur d'un corps : le «maitre» rentre dans lui-méme, tout comme nous évoluons dans les dessous, les fondations de la Grande Arche. Je travaille toujours à partir du lieu dans lequel je me trouve. L'espace joue pour beaucoup dans la mise en scene, et je ne me contente pas de faire du simple théâtre d'idées.»

Fort de sa formation dans les arts plastiques, sans Dieu ni maitre, mais admirant tout de méme le travail d'un Chéreau, GrÜber ou Peymann, Éric Vigner a pour ambition de répondre sur les planches à la question : «Qu'est-ce que vous foutez là ?» Pour ce faire vingt-deux acteurs interprètent les quarante rôles imaginés par Dubillard, soit un maitre et vingt et un domestiques dérangeants. «J'ai choisi des acteurs très jeunes, dont la moitié vient des grandes écoles de théâtre, l'autre n'y est jamais passée. Tous les acteurs sont des associés dans le travail de production, puisqu'ils sont payés à la recette. La devise de la compagnie est : «Mieux vaut parler comme on veut que comme il faut. C'est dire si nous recherchons un théâtre peu consensuel, capable d'originalité et seulement désireux de plaire à tous les publics. »

Les personnages absurdes de Dubillard évolueront dans un univers étrange : planté au centre, un sapin, seul élément végétal ; à perte de vue des bidons empilés, comme dans un entrepôt, «qui rendent compte de l'immensité du lieu», confie le metteur en scène. «Les acteurs jouent partout, au milieu du public, dans tous les recoins, sous le plancher. J'ai fait en sorte que les comédiens se situent dans l'espace des spectateurs et inversement ; si bien que le public est invité à partir pour un voyage qui commence à l'entrée de la salle.»

La pièce se prête d'ailleurs à toutes les innovations. Visionnaire et philosophique, elle ne possède pas d'intrigue, de trame dramatique réelle : «Il s'agit de quatre-vingts scènes mises bout à bout», explique ÉRIC VIGNER, «il n'y a pas de conclusion. Une boucle est bouclée tous les jours et tout recommence. C'est une pièce puzzle, qui pose la question de l'existence à chaque scène, pour chaque personnage qui intervient. »

Un casse-tête chinois très attendu.

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Sujet: 
Un casse-tête chinois très attendu.
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18 Oct 1991
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