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EDENNE · 25 janvier 2010
La manie d’une fausse clarté (féministe)
Érotisme, fantasmes et ambiguïté ne sont que quelques-unes des empreintes que m’a laissées SEXTETT, la toute dernière création de Rémi de Vos.
Le synopsis, par sa simplicité et les antagonismes qui s’en dégagent, annonce rapidement les couleurs de cette comédie érotique : Simon, un jeune publicitaire skinny et charmant, retourne à la maison de sa mère [...]
Érotisme, fantasmes et ambiguïté ne sont que quelques-unes des empreintes que m’a laissées SEXTETT, la toute dernière création de Rémi de Vos.
Le synopsis, par sa simplicité et les antagonismes qui s’en dégagent, annonce rapidement les couleurs de cette comédie érotique : Simon, un jeune publicitaire skinny et charmant, retourne à la maison de sa mère morte accompagné par une collègue de travail amoureuse de lui. Bien malgré lui, Simon se retrouve hanté par un spectre de femmes déjantées, fantasmagoriques, fantasmatiques : une collègue folle amoureuse, une prostituée/un travesti, une chienne, deux voisines lesbiennes/bisexuelles polyglottes.
Plutôt que d’articuler une critique entièrement féministe de l’œuvre, il me semble plus à propos de poser un regard ludique et ouvert sur cette œuvre traitant de la confusion des identités et de la malléabilité des genres.
Aux yeux de la directrice artistique de l’Espace Go, Ginette Noiseux :
La création de SEXTETT est audacieuse, très drôle et très juste par rapport à notre Théâtre qui depuis ses origines questionne nos identités : celles des filles, des gars, et de nos rencontres. SEXTETT n’est pas une pièce féministe, comme on aurait pu s’y attendre. Ce n’est pas une pièce machiste, comme on pourrait le croire. Car il ne s’agit là que d’une comédie contemporaine.
Alors que SEXTETT transporte le public dans un mode onirique, voire caricatural, Éric Vigner, le metteur en scène de la pièce, souligne les similarités de SEXTETT avec les œuvres cinématographiques de Fellini, à travers lesquelles la fascination pour les femmes (une fascination à la fois enivrante et effrayante) du protagoniste masculin y est omniprésente.
C’est une fable sur les femmes d’hier et d’aujourd’hui racontée par un homme qui ne peut pas connaître la femme parce qu’il est en elle comme le petit chaperon rouge errant dans le bois. C’est un rêve, et il emploie le langage symbolique des rêves. J’aimerais qu’on voie ce film sans se laisser aveugler par la tentation de comprendre : il n’y a rien à comprendre. Alors je déteste cette maladie contemporaine qu’est le besoin d’idéologie, la manie d’une fausse clarté : on renvoie tout à une sorte de tribunal de la rationalité qui analyse, diagnostique, ordonne un traitement contre l’indéchiffrable. Inconscient, notre zone obscure, nourrie de confusion, d’inattendu et de changeant, met mal à l’aise, fait peur. Mais c’est une composante extrêmement précieuse : pourquoi la supprimer, pourquoi se mutiler?
Fellini, à propos de son film La Cité des femmes.
En somme, peut-être devrait-on s’employer à goûter les œuvres d’art contemporaines sans à inévitablement devoir les condamner, les critiquer (malgré notre sens aiguisé de la critique féministe).