Note d’intention · ÉRIC VIGNER
Au moment de MARION DE LORME, lors d’une rencontre avec le public, BERNARD NOËL a avoué son pessimisme extrême, et a ajouté : “si une chose peut sauver le monde, c’est la diction...”
Les textes de LACAN autour de L’ÉCOLE DES FEMMES comptent parmi les plus beaux que j’ai pu lire. Il raconte que L’ÉCOLE DES FEMMES est le manifeste de la comédie classique, le sommet de la pyramide. Il explique aussi que la mort de la comédie classique, c’est le théâtre romantique, VICTOR HUGO.
Je viens de monter MARION DE LORME, qui se situe au XVIe siècle, au temps où naît le théâtre classique... et CORNEILLE est le père de la tragédie classique.
MOLIÈRE, avec L’ÉCOLE DES FEMMES, devient le maître de la comédie classique. C’est de cette prise de position artistique et politique que naît la fameuse querelle de L’ÉCOLE DES FEMMES. RACINE doit tout à MOLIÈRE. Mais il a créé un théâtre parfait, un triangle équilatéral. Et ce qui est parfait n’existe pas. Le théâtre de MOLIÈRE allie l’intelligence, le génie de la construction et le sentiment humain.
C’est l’histoire même d’Arnolphe, et c’est pourquoi il se retire à la fin de la pièce. Arnolphe est un humaniste du XVIIIe siècle, il place l’homme au centre du monde. Il finira même par donner Agnès, sa propre création au jeune Horace. Après avoir fait d’Agnès une femme, il fera d’Horace un homme. Il va au bout de son projet, et se retire.
MOLIÈRE fait avec RACINE ce qu’Arnolphe fait avec Horace. Et Horace ne connaît pas le sentiment. Peut-être sait-il mieux raconter les histoires, mais il n’a pas de cœur. Horace est déjà un Dom Juan. Agnès sera bientôt Célimène.
L’ÉCOLE DES FEMMES est une matrice, elle contient toute l’œuvre de MOLIÈRE.