SYNOPSIS · LA MAISON D'OS
Roland Dubillard · Jeudi 6 mai 1962
"Il n'y a que Paris pour ces tragédies bourgeoises. Ces jours-ci est morte une semaine après son mari, Mme x. La Maison x, sans un capital bien connu, était une maison à chevaux, à voitures, à nombreux domestiques. La malade est morte dans son lit, sans avoir été complètement déshabillée, pendant cinq jours, par ses femmes faisant une noce d'enfer avec les domestiques dans le sous-sol; et des sinapismes ayant été recommandés par le médecin, c'est le cocher complètement saoul, qui les lui a posés sur ses bas, oui sur ces bas, qui n'avaient pas été retirés".
Suggéré par ce passage du Journal des Goncourt (1880), le sujet de La Maison d'Os est l'agonie d'un vieillard très riche, sans famille, entouré d'une quarantaine de domestiques pour qui la question n'est pas là.
La pièce (comédie ou tragédie ?) n'a pas l'air "construite". En réalité elle est construite comme une maison. C'est à dire qu'elle n'est pas en mouvement, construite dans le temps comme une symphonie ou un drame. Si elle dure un certain temps, c'est qu'il faut du temps pour tout (pour voir une peinture, pour visiter des ruines).
L'Action (ou l'inaction) se passe dans une maison trop vieille, isolée du reste du monde, abandonnée par lui comme ses habitants s'abandonnent les uns les autres; la vie s'y joue surtout dans un espace vertical, de la cave au grenier. Les relations du maître à ses domestiques (médecins, prêtres ou avocats compris), des domestiques entre eux, du maître à soi-même et à la mort et enfin des pierres et des poutres de la maison entre elles; ces relations sont assez diverses et nombreuses pour donner une apparence de mouvement à cette construction inerte, à ce bâtiment; comme un cadavre semble animé par ses vers.
Le sujet n'est pas plus macabre que celui de plusieurs œuvres classiques. Il n'empêche pas La Maison d'Os de s'orienter dans le sens de la vie, voire de la rigolade. L'auteur assure n'y avoir dissimulé aucune philosophie.
NB: "La Maison d'Os" a été représentée pour la première fois au Théâtre de Lutèce en 1962, dans une mise en scène d'Arlette Reinerg, avec Arlette Reinerg, Denise Perron, l'auteur, Jacques Seiler,Jacques Marchais, Marc Eynaud puis Yves Yannek, Romain Bouteille , François Marié.