Entretien d’ÉRIC VIGNER et Stéphane PATRICE
"Court-Circuit", Radio Libertaire, Paris, novembre 2006
PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA est un exploit, un prodige, un spectacle spectral qui joue de l’hétérogénéité de deux œuvres de MARGUERITE DURAS : LA PLUIE D'ÉTÉ et HIROSHIMA MON AMOUR. Pour les unir, les faire affleurer, flirter, les relier dans une succession qui est aussi une fusion, confusion qui requiert une intelligence critique, habile à débusquer les subtilités, les finesses, les arrangements, les fulgurances, les feux du metteur en scène qui, au-delà de sa biographie et de l’anecdote, arrange la scène pour un public qui peut aussi voir dans PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA l’hypersensibilité de l’artiste, hypersensibilité au monde, à son temps, à son siècle et à notre histoire. L’artiste, c’est sans doute, d’abord : l’auteur, MARGUERITE DURAS ; mais ce sont aussi sur scène : les comédiens et les comédiennes. Et hors champs, hors scène, en coulisse : le metteur en scène, ÉRIC VIGNER.
S.P. : ÉRIC VIGNER, vous êtes né en 1960, au moment où MARGUERITE DURAS publie HIROSHIMA MON AMOUR chez Gallimard, un an après le film réalisé par Alain Resnais, qui était sorti donc en 1959. Vous avez étudié l’art dramatique successivement au Conservatoire de Rennes, à l’Ecole de la rue Blanche à Paris, et au Conservatoire National Supérieur d’art dramatique, à Paris. Vous avez fondé également en 1990, l’année où les Editions P.O.L. publient LA PLUIE D'ÉTÉ de MARGUERITE DURAS, la compagnie Suzanne M. Suzanne, personnage durassien par excellence puisque c’est le personnage qui est présent dans Un Barrage contre le Pacifique. Suzanne, la jeune fille, la sœur de Joseph. En 1993, vous portez à la scène LA PLUIE D'ÉTÉ, et c’est la rencontre avec MARGUERITE DURAS qui est enchantée par votre travail. En 2002, vous faites entrer Duras au répertoire de la Comédie Française avec SAVANNAH BAY. Et cette année, 2006, alors que nous célébrons les 10 ans de la mort de MARGUERITE DURAS, vous créez PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA, d’abord cet été dans le Cloître des Carmes à Avignon, sous un ciel d’été et un public de connaisseurs, en partie, avant de venir à Paris, à Nanterre plus précisément, où vous êtes accueilli au Théâtre des Amandiers. Alors cette rencontre avec MARGUERITE DURAS, ÉRIC VIGNER ? On rencontre souvent Duras lorsqu’on est adolescent, mais il semble que vous l’ayez rencontrée plus tard dans votre parcours, dans votre vie, est-ce que je me trompe ?
E.V. : "Non, non, non, je l’ai rencontré assez tard, je n’étais pas un durassien ; j’ai eu la chance d’avoir une sœur qui aime Duras depuis l’adolescence, Bénédicte, voilà, avec qui je travaille depuis dix ans. Quand on m’a proposé de travailler au Conservatoire National Supérieur d’art dramatique, on m’a proposé aussi de travailler sur Duras, alors je suis allé chez elle..."
S.P. : Chez votre sœur, et non chez MARGUERITE DURAS.
E.V. : "Pas tout de suite, je suis allé chez Duras plus tard, un peu plus tard. Chez ma sœur, oui. Et donc j’ai découvert ce livre que je ne connaissais pas, qui est un livre sur le savoir et la connaissance ; et je trouvais que c’était intéressant de travailler cette question avec des élèves de troisième année, des gens qui allaient sortir de l’école, et s’affronter à la vie, à la vie réelle. Et cet atelier est devenu un spectacle. MARGUERITE DURAS, c’est vrai, a vu cet atelier au Conservatoire, puis à Brest quand on l’a repris dans un ancien cinéma désaffecté des années cinquante, et à Aubervilliers. Enfin cela a été une longue histoire."
S.P. : Traversons, et déportons nous de cette histoire, pour venir jusqu’à nous, les années 2000, et notamment 2002, au moment où vous faites entrer Duras à la Comédie Française, comment se passe l’entrée d’un auteur à la Comédie Française, un auteur notamment aussi sulfureux que MARGUERITE DURAS qui a été à la fois aimée, adorée, mais qui a aussi suscité certaines foudres ?
E.V. : "Pour moi, c’était réparer une forme d’injustice et honorer une promesse secrète faite à MARGUERITE DURAS ; il y avait Sarraute, beaucoup d’auteurs comme cela qui étaient entrés au répertoire de la Comédie Française, mais pas MARGUERITE DURAS, alors je trouvais que c’était un peu étrange. Donc j’ai proposé à l’administrateur de mettre en scène SAVANNAH BAY avec Catherine Hiegel et Catherine Samie. L’administrateur a accepté, et je l’ai fait."
S.P. : Pour ce spectacle PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA, il y a l’association de deux textes de MARGUERITE DURAS, prenons-les l’un après l’autre pour commencer. D’abord : LA PLUIE D'ÉTÉ, ensuite : Hiroshima, mon amour. Première question pour LA PLUIE D'ÉTÉ: LA PLUIE D'ÉTÉ, ÉRIC VIGNER, est-ce que cela désigne les larmes de Dieu ? Vous avez joué dans le Cloître des Carmes à Avignon, il y a aussi cette question du rapport à Dieu ou de l’absence de Dieu dans LA PLUIE D'ÉTÉ ?
E.V.: "Oui, il y a la question de l’existence ou l’inexistence de Dieu, mais on n’arrive pas très bien à choisir entre les deux. Duras, c’est une mystique laïque pour moi. C’est quelqu’un qui a la foi, mais qui n’a pas de Dieu religieux, ou quelque chose comme cela. La question de Dieu est permanente dans l’œuvre de MARGUERITE DURAS ; mais, les universitaires me contrediront sûrement, ce n’est pas explicite, il y a très peu de phrases où MARGUERITE DURAS parle de Dieu, ou fait un commentaire sur son œuvre."
S.P. : Une mystique laïque, c’est une belle formule, une belle définition, en effet. Ernesto, le personnage, le jeune garçon qui a entre 10 et 20 ans, et qui a derrière lui 40 ans de philosophie, le nom même d’Ernesto fait peut-être déjà signe vers le prénom de Renan, Ernest Renan, auteur d’Une vie de Jésus qui avait passionné Duras. C’est peut-être Duras elle-même ou je ne sais quel commentateur qui disait qu’Ernesto est un nouveau Christ.
E.V.: "C’est un porteur de parole, c’est quelqu’un qui vient dire quelque chose, c’est un annonciateur (...). C’est pourquoi je voulais le faire dans le Cloître des Carmes à Avignon ; car souvent le Cloître des Carmes est utilisé comme un support décoratif, il y a un troisième mur, un gradin, une petite scène (...). Ce qui m’intéressait, c’est de redonner vie à ce cloître pour lui redonner sa dimension originelle, c’est-à-dire une architecture destinée à une méditation spirituelle. Et puis MARGUERITE DURAS est quelqu’un qui a beaucoup travaillé à partir des lieux, des lieux désaffectés en particulier pour les réaffecter ; donc cela m’intéressait de faire arriver cet ange annonciateur, une sorte de fin du temps."
S.P. : Alors, cet ange spirituel, Ernesto, est-ce qu’il est aussi révolutionnaire ? Ernesto c’est aussi un nom de révolutionnaire, non ?
E.V. : "Il veut la fin du monde pour un monde nouveau ; moi ce qui me plait beaucoup dans l’œuvre de MARGUERITE DURAS, c’est qu’il faut en finir avec ce monde-là pour en inventer un autre."
S.P. : Venons-en au deuxième élément de votre travail PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA : HIROSHIMA MON AMOUR.
HIROSHIMA MON AMOUR n’est-ce pas aussi l’amour d’Hiroshima, c’est-à-dire, pour MARGUERITE DURAS, l’amour de la douleur ?
E.V. : "L’amour de la douleur, j’ai l’impression que dans la douleur il y a l’amour, c’est-à- dire que la douleur cela veut dire amour chez MARGUERITE DURAS, c’est un sentiment tout à fait amoureux, la douleur ; et moi ce qui me plait beaucoup dans HIROSHIMA MON AMOUR, c’est que sur les ruines (...), une femme va pouvoir retourner sur son passé, retrouver son histoire ou l’écrire en tout cas, et ensuite choisir définitivement sa fin, la fin de cette histoire. C’est la première fois. Elle était dans la douleur de ne pas être morte d’amour à Nevers (...). Et là, dans sa rencontre avec ce Japonais à Hiroshima, sur ces trois jours exceptionnels, ces trois nuits exceptionnelles, dans cet amour passionnel et charnel, elle retrouve ce sentiment qu’elle avait oublié, et puis elle décide définitivement de tuer cette histoire, c’est cela que je trouve très incroyable ; et, pour moi, le personnage de la femme dans HIROSHIMA MON AMOUR est un personnage assez unique, ce n’est pas Lol V. Stein par exemple."
S.P. : Effectivement, il y a : La Douleur. C’est un texte de MARGUERITE DURAS – qu’elle a publié dans les années 80 –, relatif à l’expérience de la deuxième guerre mondiale, et la douleur, dans Hiroshima, c’est aussi la douleur de la guerre, la violence des hommes, les inégalités. Et Ernesto, dans LA PLUIE D'ÉTÉ, représente aussi la banlieue en quelque sorte, cette banlieue de Vitry aux portes de Paris, et vous, vous avez été invité à travailler au Théâtre de Nanterre. Alors, une autre question maintenant : les acteurs, le choix des acteurs, une très belle distribution. Dans ce spectacle PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA, il y a huit personnages, trois personnages féminins et cinq personnages masculins, et vous ÉRIC VIGNER, pour ces trois personnages féminins et ces cinq personnages masculins, vous avez choisi quatre comédiens et quatre comédiennes. Vous introduisez la parité dans le théâtre ?
E.V.: "C’est très bien ce que vous dites, vous avez très bien vu les choses, cela fait plaisir"
S.P. : Merci.
E.V.: "Non, non ; mais je vais répondre à votre question. Parce qu’il y a cette histoire du paradoxe, du noir et du blanc, du féminin et du masculin, qui est permanente dans l’œuvre, et j’ai essayé de la traiter sur tous les aspects de la pièce. Et le journaliste, qu’on appelle"Monsieur", est joué par une journaliste".
S.P. : Qu’on appelle également"Monsieur".
E.V.: "Oui".
S.P. : ÉRIC VIGNER, encore deux mots sur vous, avant que nous parlions de ce spectacle dans un ordre plus chronologique. Dans un entretien avec Sabine Quiriconi, publié dans Les Cahiers de l’Herne consacré à MARGUERITE DURAS publié en 2005, vous avez déclaré: "Mon histoire sociale et familiale rencontrait aussi la sienne (celle de MARGUERITE DURAS) sur bien des points, pas né dans le sérail". Alors qu’est-ce que cela veut dire pour un artiste qui a reçu une décoration, vous êtes chevaliers des Arts et Lettres,"pas né dans le sérail", mais vous êtes à présent bien intronisé dans le sérail ?
E.V.: "L’origine, d’où l’on vient, c’est très important, moi je suis fils de petit commerçant, garagiste, breton, je n’avais rien normalement, c’était plus difficile pour moi de réussir, d’être acteur, d’être metteur en scène, donc cela a été un long chemin avec quelque chose de visionnaire qui m’a porté, et je ne savais pas très bien ce que c’était. Et je pense que la rencontre avec Duras, c’est-à-dire cette reconnaissance qu’il y a eu entre nous, c’était une femme âgée quand je l’ai rencontrée, moi j’étais un jeune metteur en scène, il y avait quelque chose d’une filiation qui était une filiation sociale, c’est- à-dire qu’on sentait bien qu’il y avait tout un chemin qui avait été parcouru, et c’était exister dans le monde, avoir quelque chose à dire d’une façon différente, non ?"
S.P. : Un autre propos de vous, vous avez déclaré: "Elle (MARGUERITE DURAS), elle m’a apporté cette certitude : on peut faire avec très peu, on peut faire avec rien, très peu, très simplement" ; et pourtant dans ce spectacle il y a une profusion de moyens, de moyens techniques, le décor, des costumes, des acteurs de talents.
E.V.: "Non, c’est une scénographie prototype, c’est cela qui coûte cher, car tout à coup on n’est pas dans un théâtre traditionnel, on a inventé un objet, et cet objet on l’a inventé avec les artistes M/M".
S.P. : Nous allons parler de la réception de ce spectacle : Le Journal de la culture sur Arte dit que vous êtes un maître du théâtre d’art et que vous nous proposez une mise en scène magistrale. ÉRIC VIGNER, qu’est-ce que le théâtre d’art ?
E.V. : "C’est un peu comme à Radio Libertaire, c’est d’abord un théâtre d’artisans (...). La notion d’art est assez importante car elle a quitté le monde de la culture et du théâtre".
S.P. : Je le dis avec vous, je le dis avec vous qui, par humilité, ne le dites pas directement, mais n’ayons pas peur des mots : le théâtre d’art, c’est du grand art. PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA est une œuvre magnifique. Entrons, ensemble, dans le début de la pièce : le plateau, vous avez fait référence aux plasticiens qui vous ont accompagné pour le décor ; le public est d’abord en présence d’un plateau, d’une scène qui a une certaine forme, une forme particulière, originale. Pouvez-vous nous décrire le plateau ?
E.V.: "Il faut imaginer un cloître, la projection au sol des arches, il faut imaginer un plateau qui a à peu près un mètre dix de hauteur, avec des trous, et les spectateurs sont placés dans le prolongement des arches, et cela fait comme six grandes loges qui contiennent cinquante spectateurs chacune. Et ce qui était important, c’était de placer les spectateurs dans les choses et non pas devant les choses. En fait, le théâtre que j’essaie de faire, je ne sais pas si c’est du théâtre d’art, même si quelquefois peut-être on y tend, mais ce qui est important, c’est de faire en sorte que les gens soient dans les choses, et pas devant, pas devant les idées".
S.P. : Le premier personnage à entrer sur scène est une jeune femme, une jeune comédienne qui interprétera le rôle du journaliste, mais qui avant d’être journaliste joue le rôle du narrateur. Elle entre sur scène avec le livre, LA PLUIE D'ÉTÉ de MARGUERITE DURAS, et elle va commencer à lire le propos introductif où MARGUERITE DURAS présente son travail et dans quelle continuité s’inscrit LA PLUIE D'ÉTÉ : après le texte pour enfants Ah Ernesto, après le film qu’elle a réalisé Les Enfants, et enfin LA PLUIE D'ÉTÉ qui a inspiré votre propre travail. Puis, les autres personnages entrent en scène, eux aussi portant dans leurs mains le livre de MARGUERITE DURAS LA PLUIE D'ÉTÉ, et commencent à s’installer sur le plateau, à s’asseoir, leurs pieds, leurs jambes dans ces alvéoles, dans ces trous qui parsèment la scène, et ils commencent à lire ensemble LA PLUIE D'ÉTÉ, pour le public. Pour le public, il y a cet effet de surprise de voir des comédiens qui sont, en quelque sorte, en travail. Alors, vous nous donnez au départ de ce spectacle à voir au-delà de Duras elle-même, du texte de Duras, le propre travail du metteur en scène, le metteur en scène avec les comédiens, l’appropriation du texte, c’est-à-dire le rapport à l’écrit.
E.V.: "Je pense que le théâtre c’est d’abord le texte, s’il n’y a pas d’écriture, moi je ne peux pas travailler, sinon j’écrirais. Je crois que c’est cela le plus fort, le plus difficile. Et il faut dire aussi que ce sont des gens qui aiment beaucoup les livres. Le premier mot du texte: "les livres, le père les trouvait dans les trains de banlieues". Donc ce sont des gens qui lisent beaucoup, et qui plongent dans leurs lectures et qui deviennent aussi les personnages de ces livres. Il y a un propos de MARGUERITE DURAS sur le théâtre, dans La Vie matérielle, je crois, qui s’intitule"le théâtre" où elle dit: "je vais faire du théâtre cet hiver, je vais sortir de chez moi, je vais faire du théâtre lu, pas joué".
"Voilà, c’est une déclaration d’intention par rapport au théâtre qu’elle veut faire, donc c’est très important aussi, c’est un certain type de théâtre. Moi je pense que c’est bien de commencer par lire, et après de commencer à interpréter les choses, de devenir les personnages, de rentrer dans l’illusion, et finalement d’en sortir, avec le feu".
S.P. : C’est justement ce qu’il y a d’intéressant dans votre travail, c’est que le public vous accompagne dans cette manière que vous avez de façonner les acteurs, les comédiens, et de les faire entrer dans leur rôle. Il y a aussi cette progression et après, bien sûr, les acteurs, les comédiens vont se distancer du texte ; et d’ailleurs, pour la deuxième partie, dans le deuxième moment du spectacle avec HIROSHIMA MON AMOUR, avec la scène d’Hiroshima, il y a aussi cette entrée progressive dans le rôle, où le texte n’est pas d’abord dit, il est entendu, il est écouté, il vient en voix off ; il y a aussi le même procédé pour démarrer ce deuxième temps de PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA ?
E.V.: "À la fin de LA PLUIE D'ÉTÉ, il y a destruction, il y a incendie, il y a apocalypse, il y a Hiroshima. Ernesto devient un savant, un professeur, et il participe à la construction des grandes centrales scientifiques de la terre – ce sont les derniers mots de LA PLUIE D'ÉTÉ. Sur ces ruines, une fois le feu éteint, arrivent des fantômes, des figures, et ces figures se rencontrent, une rencontre perpétuelle, en spirale. Et le propos, c’est : les voix sont détachées du corps ; on n’accède pas au théâtre tout de suite dans HIROSHIMA MON AMOUR. De même que dans le film, dans le scénario du film, on n’accède pas tout de suite à l’histoire : il y a des images d’un côté et de l’autre côté il y a un prologue".
S.P. : MARGUERITE DURAS, c’est de la littérature, c’est aussi du théâtre, et c’est du cinéma. Et vous, vous vous inscrivez en plein centre, en plein cœur, entre la littérature et le cinéma, et vous faites de Duras un théâtre. Et un théâtre assez exceptionnel, assez remarquable. Il y a donc des livres, vous l’avez rappelé tout à l’heure ÉRIC VIGNER, dans l’histoire d’Ernesto, dans l’histoire de la famille d’Ernesto. Ils sont passionnés par les livres qu’ils trouvent, dans les rues, dans les poubelles, dans les déchetteries. Et il y a un livre dans lequel Ernesto va apprendre à lire. De quel livre s’agit-il ?
E.V.: "Il s’agit du livre brûlé".
S.P. : Qui n’a plus rien à voir avec les biographies que lisent les parents.
E.V.: "Certes, non. C’est-à-dire le livre qu’il trouve, c’est L’Ecclésiaste. Il s’identifie à David, roi de Jérusalem. Il va faire l’expérience de la connaissance à travers cette histoire-là, et il va aller jusqu’au bout".
S.P. : Il apprend à lire un peu comme le Christ qui lui aussi apprit à lire d’une certaine manière. Ernest Renan, dans La Vie de Jésus, écrit: "Jésus apprit à lire et à écrire, sans doute selon la méthode de l’Orient, consistant à mettre entre les mains de l’enfant un livre qu’il répète (...) jusqu’à ce qu’il le sache par cœur (...). Jésus fréquenta peu les écoles". Alors Ernesto, à nouveau, on revient à cette idée, c’est un nouveau Christ. Ce livre brûlé, il va l’emporter, il va le foudroyer ; il trouve ce livre au pied d’un arbre, non ?
E.V.: "Oui, au pied d’un arbre, oui, sous des gravats".
S.P. : Cet arbre dans notre culture, c’est le symbole de la connaissance, dans La Bible, mais chez Descartes aussi où "toute la philosophie est comme un arbre, les racines constituent la métaphysique, le tronc est la physique et les branches qui sortent de ce tronc sont toutes les autres sciences qui se réduisent à trois principales à savoir la mécanique, la médecine et la morale".
C’est une œuvre, un travail qui donne beaucoup à penser, à la fois l’œuvre de MARGUERITE DURAS, et votre propre travail que vous superposez à celui de MARGUERITE DURAS. Pour revenir à l’hétérogénéité que j’avais soulignée de ces deux textes et que vous associez dans PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA, la première fois que j’avais vu ce spectacle, cet été à Avignon, il y avait quelque chose de surprenant, de déroutant, et voyant ce spectacle une deuxième fois, à Nanterre, effectivement, cela semble aller de soi.
E.V.: "C’est la même source, c’est la même écriture, moi c’est cela qui m’intéressait. On date souvent trop les choses, on classifie, on parcellise, on analyse, et cetera ; et en fait c’est un vent, tu vois, l’écriture, c’est une énergie, c’est quelque chose qui va couvrir toute une vie, qui va prendre différentes formes, et tout est là, à l’origine ; et donc c’était intéressant de prendre une œuvre de la vie de MARGUERITE DURAS où elle retourne à l’enfance qui est beaucoup plus douce, beaucoup plus amoureuse, beaucoup plus sensuelle, et d’y ajouter, pas d’y rajouter, mais s’ensuit une histoire qu’elle a écrite 30 ans auparavant qui est une histoire extrêmement violente, extrêmement dure. Mais tout est déjà là, dans le premier texte, il y a Auschwitz, dans le deuxième, il y a Hiroshima, c’est aussi une période de l’histoire de la vie de MARGUERITE DURAS qui a été très importante, c’est un moteur très important pour les auteurs de cette période-là, et c’est quelqu’un qui dépasse le constat nihiliste de la deuxième partie du XXème siècle, et qui nous propose une ouverture sur le début du XXIème. Je ne sais pas pourquoi, c’est comme une intuition parce que je ne suis pas philosophe, je ne suis pas un intellectuel ni universitaire, c’est plutôt des propositions comme cela, c’est une écriture qui me nourrit, qui n’est plus critique, qui n’est plus seulement critique sur le XXème ; il y a un dépassement, et en ce sens là, on en a besoin aujourd’hui, on a besoin aujourd’hui de force. Évidemment on ne peut pas nier l’histoire du XXème parce qu’on en est fait, mais je crois qu’il y a quelque chose de supplémentaire, de visionnaire qui ne prend pas encore de forme, et d’une certaine façon, je trouve que l’écriture de MARGUERITE DURAS, c’est cela, c’est une tentative multiforme d’une énergie féminine, amoureuse".
S.P. : Vous avez dit, ÉRIC VIGNER, que vous ne voyez pas Duras comme une nihiliste et que vous retiendriez plus volontiers"la poursuite du vent" plutôt que"la vanité des vanités". Dans PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA, Ernesto qui est le personnage central – c’est un enfant, et c’est un enfant prodigieusement intelligent, il y a une intelligence de l’enfance qu’on ne reconnaît pas toujours volontiers – Ernesto donc, à partir de cette première lecture, à partir de cet éblouissement, entre dans le livre brûlé : il est foudroyé par cette connaissance du monde. Alors, il ne dit pas comme Socrate"je sais que je ne sais pas", mais il dit autre chose, une autre phrase tout aussi énigmatique, il dit autre chose à sa mère, un jour, en revenant de l’école ; que lui dit-il ?
E.V.: "Je ne retournerai pas à l’école parce que à l’école on m’apprend des choses que je ne sais pas".
S.P. : Alors là, bien sûr, dans la salle, dans le public du théâtre, s’il y a des instituteurs, des institutrices, des professeurs des écoles ou de collège, tout le monde doit sursauter, s’ils n’ont pas lu le texte de MARGUERITE DURAS.
"Je ne retournerai pas à l’école parce que à l’école on m’apprend des choses que je ne sais pas" – qu’est-ce que cela veut dire cette phrase d’Ernesto ?
E.V.: "Cela dépend, cela dépend, parce que cela dépend de ce que l’on met dedans. C’est le sentiment qui porte la phrase ; et quelquefois je la comprends cette phrase, et quelquefois je ne la comprends pas".
S.P. : Et quand vous la comprenez, ÉRIC VIGNER, qu’est-ce que vous comprenez ?
E.V.: "Je comprends que je suis mortel par exemple, je comprends que je regrette de savoir que je suis mortel, voilà, c’est quelque chose comme cela, c’est un sentiment extrêmement fort et extrêmement violent qui s’approche de ce mot : la"douleur", qu’elle a essayé de définir".
S.P. : Cette mortalité, cette fragilité, on la sent tout à fait dans PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA, c’est un spectacle extrêmement tendre où les personnages sont plein d’affection les uns pour les autres, et même lorsqu’on doit rencontrer l’instituteur, cet instituteur qu’on rejette, qu’on rejetterait volontiers si on est plutôt du côté d’Ernesto, on lui donne du chewing-gum, on dialogue avec lui, on parle du temps qu’il fait aussi.
E.V.: "Parce que c’est un instituteur qui découvre quelque chose, c’est-à-dire qu’il est attiré par quelque chose".
S.P. : Il apprend de l’enfant.
E.V.: "Il apprend de l’enfant, c’est sa douleur ; du coup il quitte le savoir pour la connaissance".
S.P. : Oui, c’est même une connaissance du troisième genre comme dirait Spinoza, la connaissance du troisième genre, c’est une connaissance qui est beaucoup plus intuitive, une intuition du monde, de la totalité. Effectivement, Ernesto appréhende d’emblée la totalité du monde, c’est en trois mois qu’il apprend la Chimie, puis il passe très vite à la philosophie allemande.
E.V.: "Oui".
S.P. : Ernesto, on le voit, c’est un petit génie, comme il y a des génies du théâtre, des génies de la mise en scène, ÉRIC VIGNER, des génies de l’écriture, MARGUERITE DURAS, mais ces génies ne se sont pas faits tout seul, et MARGUERITE DURAS elle-même confessait qu’elle a elle aussi appris un peu comme Ernesto à lire dans les livres, et vous aussi vous êtes venu au théâtre pour ce spectacle PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA à partir des livres de MARGUERITE DURAS que vous avez trouvés chez votre sœur. Alors, MARGUERITE DURAS pour LA PLUIE D'ÉTÉ, elle fait dire à Ernesto, vous l’avez rappelé ÉRIC VIGNER: "Je ne retournerai pas à l’école parce que à l’école on m’apprend des choses que je ne sais pas", et en même temps, il est passionné par La Bible ; et en quelque sorte Ernesto fait écho à Rousseau qui, dans L’Emile, écrit: "Je hais les livres"."Je ne retournerai pas à l’école parce que à l’école on m’apprend des choses que je ne sais pas". Il y a aussi une proximité avec Rousseau, avec un certain refus de l’amour livresque, de l’amour scolaire, de cette éducation qui est trop encadrée, trop rigide et qui, au lieu d’ouvrir au monde, sectionne, sépare, réduit et encadre un peu trop les individus, et tue leur créativité, leur liberté.
E.V.: "Absolument, c’est un fonctionnement autodidacte, c’est-à-dire d’apprentissage par soi- même, et encore une fois, c’est un dépassement du savoir pour accéder à la connaissance".
S.P. : Dans ce spectacle, les personnages s’approchent, s’effleurent, il y a beaucoup de tendresse, nous l’avons dit, il y a de l’amour, de l’amour entre le garçon et la fille, Ernesto et Jeanne, il y a un amour presque incestueux. Et lorsqu’ils parlent d’eux-mêmes, de leurs parents, parfois ils se questionnent: "que font les parents lorsqu’ils s’enferment dans la chambre ?" ; et à un moment donné, Ernesto va comprendre de quoi il s’agit, ce qui se passe derrière la porte fermée des parents. Et plus tard, il va aussi s’approcher toujours davantage de sa sœur – est-ce que cela anticipe ce rapprochement des corps que nous aurons entre la jeune femme de Nevers et le Japonais d’Hiroshima ?
E.V.: "Oui, oui, je pense qu’on peut voir un rapprochement de ce couple-là, parce qu’en plus, ils se prennent, il me semble, dans l’immobilité, sans un bruit, à un moment donné, c’est explicitement dit, le frère et la sœur consomment l’acte sexuel ; et après il y a quelque chose qui passe par le corps seulement, et ensuite adviendra la parole. Et c’est un peu le contraire (entre la jeune femme de Nevers et le Japonais d’Hiroshima), c’est d’abord la parole, et un peu le corps, mais pas trop".
S.P. : Il y a de l’amour dans PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA ; il y a aussi de l’humour, lorsque le père d’Ernesto se demande : Qui est cette femme qui est entrée dans sa vie, qui est cette femme qui est venue de l’Est, peut-être du Caucase et qui chante en épluchant les pommes de terre, qui chante une chanson, la Neva.
Donc le père d’Ernesto se demande : Qui est cette femme qui est entrée un jour dans sa vie, lui qui vient d’Italie, elle qui vient du Caucase, pour répondre : Cette femme, c’est tout simplement la mère de ses enfants. Il y a d’autres pointes d’humour qu’on pourrait relever dans PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA ?
E.V.: "Dans Pluie d’été, c’est très drôle, dans Hiroshima, c’est un peu moins drôle, mais dans LA PLUIE D'ÉTÉ, on rit beaucoup parce qu’il y a tout un travail sur le langage, une langue un peu populaire qui a été reprise par MARGUERITE DURAS, c’est très fin, et plutôt drôle".
S.P. : Ernesto donc, vous l’avez aussi rappelé tout à l’heure, ÉRIC VIGNER, va par la suite quitter sa famille. À la fin de LA PLUIE D'ÉTÉ, il quitte sa famille comme le Christ quitte sa famille, il quitte sa crèche, sa maisonnée de Vitry, en bas des tours, des immeubles de banlieue, petite maison de fortune des parents qui touchent les allocations. Il quitte sa famille pour parcourir le monde. Alors, il y a l’autre personnage important de PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA qui quitte sa famille, de manière un peu moins glorieuse, un peu plus forcée, c’est simplement"Elle", la Française de Nevers, qui va quitter sa famille après avoir été amoureuse d’un Allemand à Nevers pendant la guerre, après le meurtre, l’assassinat de cet Allemand, après avoir été la honte de Nevers, après avoir séjourné dans la cave de la maison familiale, de son père pharmacien, elle va quitter donc elle aussi sa famille, mais d’une manière beaucoup plus violente.
E.V.: "Elle quitte sa famille, oui, la nuit, elle part pour Paris à bicyclette, après un séjour un peu difficile dans la cave de la pharmacie familiale, et une fois que les cheveux ont repoussé, puisqu’elle a été tondue à la Libération".
S.P. : Elle quitte Nevers, elle quitte la Honte.
E.V.: "Elle quitte Jamais, elle quitte Nevers, c’est l’endroit le plus improbable du monde. Et elle quitte pour construire quelque chose. Donc elle va construire quelque chose pendant un temps : elle va se marier, avoir des enfants ; et puis on la retrouve quelques années plus tard à Hiroshima, où – comme par hasard – c’est une actrice aussi, elle est devenue actrice, et elle joue dans un film sur la paix à Hiroshima. À ce moment-là, elle va se souvenir de Nevers, elle va se souvenir de Nevers comme étant le nom, le mot, de l’amour initial".
S.P.: "Elle", elle quitte..."Elle", d’abord, on peut nommer aussi l’actrice qui est remarquable, son nom c’est... je le prononcerais sans doute mal...
E.V.: "Jutta Johanna Weiss".
S.P. : Donc une actrice remarquable, qui nous fait presque oublier Emmanuelle Riva.
E.V.: "C’est très différent".
S.P. : Les deux sont remarquables. Cette jeune actrice, autrichienne ?
E.V.: "Oui, dans ce spectacle, les deux acteurs principaux, porteurs de cette parole au plus haut sont deux acteurs autrichiens. Nicolas Marchand..."
S.P. : Qui joue Ernesto.
E.V.: "Qui joue Ernesto, c’est un produit de la réconciliation d’après guerre puisqu’il est issu d’un père normand et d’une mère salzbourgeoise. Et Jutta Johanna Weiss est une actrice, autrichienne, viennoise. Donc sa langue, maternelle, c’est l’allemand, mais c’est une actrice qui n’a pas voulu jouer en allemand, encore ; donc elle a joué en anglais, elle a joué aux Etats-Unis et ensuite elle a rencontré un Français, donc elle est restée en France un certain temps, et elle a travaillé, en français, donc voilà. Il y a quelque chose d’étonnant là-dedans, cette femme qui ne veut pas se souvenir, qui travaille sur l’oubli".
S.P. : Donc vous le disiez très justement,"Elle", cette Française qui va voyager à Hiroshima pour faire un film, elle quitte Nevers, elle quitte"Jamais", vous venez de le dire, et chez Duras il y a cette dialectique entre la mémoire et l’oubli ; et Michel Foucault disait"Le discours est entièrement (...) chez Duras dans la dimension de la mémoire qui a été entièrement purifiée de tout souvenir, qui n’est qu’une sorte de brouillard, renvoyant
perpétuellement à de la mémoire, et chaque mémoire effaçant tout souvenir et ceci indéfiniment"1 . Alors, il y a cette dialectique entre la mémoire et l’oubli dans ce travail que vous nous présentez à Nanterre, et cette Française d’Hiroshima, elle est un peu illuminée, à nouveau comme Ernesto, elle est illuminée par cette vision qu’elle a du monde, à Hiroshima où justement Hiroshima, c’est aussi Nevers en quelque sorte ?
E.V.: "Oui, oui".
S.P. : C’est la même violence.
E.V.: "Oui, bien sûr, c’est la même chose, c’est la même lumière, c’est la même foudre. C’est- à-dire ce que cherchent les héroïnes, les héros dans l’œuvre de MARGUERITE DURAS, c’est ce point incandescent, ce foudroiement, c’est cela qu’on cherche".
S.P. : Ces deux génies de Duras, ces deux génies du texte, et ces deux génies de la scène, les deux acteurs que vous nous donnez à voir, Nicolas Marchand (Ernesto) et Jutta Johanna Weiss (la Française de Nevers), ils sont aussi des personnages qui incarnent la folie : la folie individuelle, comme la folie du monde, la folie des hommes. Mais la folie individuelle qui est maîtrisée par Ernesto qui devient un éminent professeur, de je ne sais pas quoi d’ailleurs, de tout un peu, dans toutes les universités du monde...
E.V.: "Il devient un savant, professeur, et ensuite un savant".
S.P. : Tandis que"Elle", la Française de Nevers déportée à Hiroshima, elle cultive un peu plus douloureusement cette folie qu’elle a un peu plus de mal à maîtriser.
E.V.: "Justement, j’ai l’impression qu’elle retrouve en conscience, elle tue en conscience, elle tue l’amour initial en conscience à la fin d’HIROSHIMA MON AMOUR"
S.P. : ÉRIC VIGNER, dans le prolongement que vous proposez de LA PLUIE D'ÉTÉ avec Hiroshima, il y a aussi le costume, le costume du comédien qui incarne le Japonais d’Hiroshima. Il entre en scène lui aussi, comme"Elle", comme cette Française de Nevers à Hiroshima. Ils sont tous les deux très élégants. Il y a beaucoup de beauté ; c’est très esthétique, très esthétisé mais dans le bon sens du terme. C’est un spectacle qui est véritablement d’une grande beauté. Le costume, les costumes des comédiens, de la comédienne et du comédien. Donc ce costume blanc du Japonais d’Hiroshima, c’est aussi un peu le costume blanc que porte Ernesto à la fin du spectacle, mais qui lui va un peu moins bien, qui est un peu trop court au niveau des manches, pour Ernesto.
E.V.: "Oui, voilà, c’est cela".
S.P. : C’est le même costume ?
E.V.: "Oui, c’est le même".
S.P. : Ils s’échangent en coulisse le costume. Et peut être plus sérieusement, il y a aussi dans ce spectacle – où justement les commentateurs, les critiques, les durassiens, d’habitude, aiment beaucoup voir en Duras la lutte des sexes, le masculin/féminin, cette question de l’amour, alors que pour ma part, j’ai toujours préféré voir en Duras la lutte des classes, les inégalités, la violence du monde et de l’histoire – et ce que j’aime beaucoup sur votre plateau, sur scène, sur votre plateau, il y a des pommes de terre : c’est un plateau de pommes de terre, il y a des pierres enveloppées dans de l’aluminium comme ces pommes de terre qu’on met dans la cendre pour déguster, l’hiver, au coin du feu ; et ces pommes de terre nous déportent, à leur tour, vers Hiroshima, vers cette pluie de cendre qu’a été Hiroshima.
E.V.: "Oui, c’est cela, je ne vais pas rajouter autre chose".
S.P. : PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA est un théâtre d’art, réalisé en artiste et mis en scène magistralement par ÉRIC VIGNER. ÉRIC VIGNER, merci pour la beauté et l’intelligence de votre travail, de ce spectacle, et merci d’avoir si aimablement accepté cette conversation.
1 Dits et écrits, Gallimard, Paris, 1994, vol. 2, p. 763.
Stéphane PATRICE enseigne l’Histoire du Théâtre à l’Université d’Evry Val d’Essonne.