L'INSTRUCTION · Oratorio en onze chants · 1983
Présentation
LA PIÈCE
Peter WEISS songeait à un vaste projet théâtral inspiré de "La Divine Comédie" de DANTE, mais à une Divine Comédie consacrée aux victimes et aux bourreaux de notre temps, le Paradis étant celui des bourreaux qui, après leurs crimes continuent de vivre éternellement impunis, et l'Enfer celui des victimes qui n'obtiendront jamais réparation de leurs souffrances.
Alors que se déroule à Francfort, 20 ans après les évènements, le procès d'un certain nombre de responsables subalternes du camp d'extermination d'Auschwitz, Peter WEISS commence à écrire "L'Instruction" qu'il termine en juin 1965, avant même que le jugement soit prononcé. Il n'est pas question pour l'auteur de montrer directement Auschwitz sur scène ou d'imaginer quelque action dramatique qui se situerait à l'intérieur des camps et mettre en jeu des personnages de détenus et de bourreaux. C'est donc le procès qu'il décide de mettre en scène, en le suivant et en lisant les compte-rendus de séances. Il crée ainsi "L'instruction".
"Je désirais une investigation scientifique de la réalité d'Auschwitz pour montrer au public jusque dans les moindres détails ce qui était arrivé."
"J'ai d'abord écrit "l'instruction" pour moi, parce que j'avais besoin de comprendre le complexe des camps et comment on avait pu en arriver là".
" La diffusion de la vérité est liée à de grandes difficultés. Il nous faut d'abord surmonter la première difficulté, découvrir avant tout la vérité et lorsque nous l'avons trouvée, nous devons travailler en tant que partisans à sa diffusion".
LA MISE EN SCENE
Nous jouons cette pièce, nous acteurs qui n'avons pas connu l'époque des camps d'extermination mais le théâtre se joue au présent. C'est pourquoi la mise en scène est articulée sur deux modes de représentation :
* l'instruction d'un procès, durant laquelle témoins et accusés sont confrontés par le juge en présence des avocats.
* les séquences oniriques, qui ne sont pas des représentations réalistes, mais la mise à nu de nos propres souvenirs, de nos angoisses, de notre imaginaire en quête de vérité.
L'INSTRUCTION AUJOURD'HUI
Ainsi nous cherchons à représenter le présent pour faire revivre le passé.
Et l'actualité vient de nous rendre visite en la personne de Klaus BARBIE.
Situation exceptionnelle pour des acteurs, que celle d'avoir devancé l'événement. Ceci rend notre démarche plus actuelle.
Et se posent avec encore plus d'acuité les questions que nous révèlent L'instruction: Faut-il juger et comment ? Doit-il y avoir prescription? Justice ou Vengeance ?
La mémoire et l'oubli sont à l'évidence bien fragiles, que ce soit pour ceux qui ont survécu aux camps, que pour ceux qui, aujourd'hui accusés, voudraient n'être toujours pas vaincus.
Pour tous, la volonté de survivre.
LES ACTEURS
"L'instruction" de Peter WEISS a été répétée et va être représentée par l'Atelier de Formation Professionnelle du Conservatoire National de Région d'Art Dramatique.
Ce sont donc des acteurs en cours de formation qui jouent cette pièce. Il s'est agi, dans ce travail, de fonctionner avec un esprit de troupe et, même s'il y a eu un metteur en scène, celui-ci n'a pas joué ce rôle "dictatorial" trop souvent rencontré aujourd'hui. Chaque acteur, avec sa personnalité, ses propositions, son imaginaire, a participé à la réalisation commune.
Ne pas se plier à une esthétique établie à l'avance, mais la découvrir ensemble, dans l'affrontement, la discussion et aussi dans le jeu, dans la joie de fabriquer une œuvre d'art.
Projet ambitieux qui veut remettre en lumière l'importance de l'acteur, qui par sa présence effective est le véritable artisan du rêve et des émotions qu'il livre au public.
Robert ANGEDAUD, Marie-Thé BLOT, Christophe DRAULT, Alain CAUBET, Laurence COLIN, Sylvie DAMMEKENS, Michel DELOISY, Marie-Noëlle DIBOUES, Isabelle FARIA DE OLIVEIRA, Vincent GATEL
Pascal GUARISSE, Sophie MARCHAND, Christophe MARECHAL, Isabelle MICHEL, Harcela OBREGON, Dominique PREVOSTO, Philippe RISLER, Brigitte STANISLAS, Bruno VESLIN, Éric VIGNER
PETER WEISS (dramaturge suédois, d'origine allemande)
Ne le 8 novembre 1916 à Nowawes, près de Berlin, d'un père industriel d'origine juive et d'une mère actrice, Peter WEISS est mort le 10 mai 1982 à Stockholm.
En 1934, devant la montée du nazisme, Peter WEISS quitte l'Allemagne ainsi que sa famille. Il a 18 ans et va se réfugier d'abord en Angleterre, puis en Suisse, et enfin à Prague où il étudie la peinture, s'établit comme peintre et assure la régie de films expérimentaux.
Fuyant de nouveau les nazis, il va rejoindre sa famille en Suède en 1939. Une famille bourgeoise qu'il va bientôt quitter, comme il va s'écarter du milieu des réfugiés allemands pour se rapprocher de l'avant-garde suédoise. Il compose ses premiers essais littéraires en suédois.
En 1963, sa pièce "La persécution et l'assassinat de Jean-Paul MARAT représentés par le Groupe théâtral de l'hospice de Charenton sous la direction de M. de SADE" est mise en scène par Peter BROOK à Londres puis Ingmar BERGMAN à Stockholm. C'est un immense succès et Peter WEISS s'impose alors comme l'un des grands dramaturges contemporains de langue allemande.
Suivent d'autres œuvres théâtrales : "Monsieur Mockinpott" 1963 , "L'Instruction" (1965), "La Complainte du fantoche lusitanien” (1967) , "Trotski en exil" (1969) et "Hölderlin" (1971).
Peter Weiss était un adepte d'un théâtre documentaire, populaire et politique. Influencé par BRECHT, il voulait tout dire, tout montrer: les contradictions de l'histoire, la révolte des femmes, l'oppression du pouvoir, de l'argent, la compromission des penseurs officiels.
À travers le théâtre, Peter WEISS est resté fidèle à une démarche : rester un chercheur sans hésiter à remettre en cause ce qu'il croyait acquis.
Extrait du parcours
Générique & production
Œuvre originale
Peter Weiss (Neubabelsberg près de Berlin, 8 novembre 1916 – Stockholm, 10 mai 1982) est un écrivain et dramaturge allemand, également cinéaste, peintre et graphiste.